La musique berbère fait son entrée dans l'espace de la musique de chambre
L'amazighe (berbère) fait son entrée dans
I. Avant le concert de Zoubeida Idrissi
La tradition musicale berbère a plusieurs caractéristiques dont celle d'avoir été jusqu'ici une musique des grands espaces de plein air des asays (agoras villageois, halqa des souks etc.). Cette dernière caractéristique a notamment pour répercussion sur le plan de la mélodie et de l'interprétation le fait que la voix a toujours été posée sur un registre haut. On ne reproduit jamais une phrase ou un segment de phrase musicale dans l'octave inférieur, et la voix est toujours maintenue élevée comme dans les chants des champs.
Ceci vaut aussi bien pour le chant de l'ahwash que pour la chanson des rways. En plus, la mélodie est réduite à une seule phrase musicale avec deux variantes: l'appel et la réponse. A part certaine ballades narratives des rways, le tempo est souvent dansant en ultra rapide.
Avec un chant inspiré de l'ahwash de Demnat et la berceuse ashrurru n'Ayt Atiq de la mezzo soprane Zoubeida Idrissi, cette musique se dote d'un autre format moderne de composition mélodique, d'arrangement instrumental et d'interprétation, à savoir le format du lied et de la musique de chambre en général dite également parfois petite musique (angl. Little music; allm. Klein Musik).
En plus de sa valeur artistique intrinsèque, ce format offre à la musique berbère des possibilités de mieux s'intégrer dans le nouvel environnement social caractérisé par un une urbanisation rapide de la population. Des expériences comme celle de Belaid El-Akkaf ont déjà assuré cette adaptation pour la musique instrumentale (https://orbinah.blog4ever.com/blog/lire-article-162080-1576131-la_musique_amazighe_a_l_honneur__prix_farabi__dece.html ), sans parler des recherches de fond du grands compositeur Ahmed Essyad ni oublier les recherches prometteuses du jeune compositeur Nabil Benabdeljalil. Mais c'est avec l'expérience pionnière de Zoubeida Idrissi que le chant s'accommode au nouvel environnement de la modernité. Elle a choisi pour cela une ballade champêtre et une berceuse, tout en respectant les modes de la mélodie originale de la musique berbère, le pentatonisme en l'occurrence.
La ballade de Demnat et laberceuse des Ayt Atiq sont, respectivement, la première et la septième des douze pièces que compte le programme de Zoubeida Idrissi pour Mawazin 2010, intitulé Itinéraire Méditerranéen. Cet itinéraire propose au public en une demi douzaine de langues un périple artistique à travers les espaces musicaux de
Zoubeida Idrissi s'est produite le 28 mai 2010 à 19:30 à
Orchestre : Groupe Zoubeida Idrissi
Arrangement : Oussama Nouasri
Alto : Tamara Samsalieva
Luth : Oussama Nouasri
Cello : Mekkaoui Noureddine
Qanun : Mekkaoui Abdennaceur
Percussion : Adil Belfadda
Restitution des paroles à partir d'une traduction française: Mohamed Elmedlaoui
Ecoutez Asehrourrou n-Ayt Atiq ("La berceuse des Ayt Atiq):
https://www.youtube.com/watch?v=-ObS-46G1Iw
Eciutez également Winu, nrak "Bien aimé, tu nous manques"
https://www.youtube.com/watch?v=zCnqGXOGK-c
Pour en savoir plus sur Zoubeida Idrissi :
Site web : http://www.zoubeida.com/
Le prix Farabi 2007:
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II. Après le concert
Zoubeida Idrissi :
De l'interculturel à travers la musique
A la veille de la clôture de la 9° édition de Mawazin, le public mélomane amateur du chant classique était au rendez-vous, le 28 mai 2010 dans le magnifique Villa des Arts de Rabat, avec Zoubeida Idrissi et son orchestre. Au menu, un Itinéraire Méditerranée. Un véritable voyage interculturel à travers la mélodie et le verbe plurilingue autour de ce berceau de tant de civilisations qu'est le rivage méditerranéen.
Au commencement, une première musicale: un chant berbère de Demnat adapté aux arrangements des lieder de la petite musique (Klein Musik) de concerto (Alto, luth, cello, qanun, percussion) et à la voix d'une mezzo soprane qui a fait ses preuve dans les domaines du chant classique occidental et du tarab maroco-andalou. Une adaptation qui garde pourtant le trait essentiel de l'art d'origine, que le public a bien reconnu d'emblée dès les premières notes et a bien apprécié par ses applaudissements. Il s'agit du pentatonisme modal, trait distinctif qui donne son originalité à la musique berbère marocaine. Ce fut également le cas avec l'autre pièce berbère qui est une berceuse intitulée Ashrurru n-Ayt Atiq.
Le périple artistique du public avec la voix soprane de Zoubeida Idrissi s'est poursuivi par la suite, en une demi douzaine de langues, dans une parfaite harmonie de transition d'une pièce à l'autre sur le plan mélodique. En partant de cet espace maroco-andalous d'un grand théoricien de la musique, Avempace (Ibn Baja), le périple culmine dans
Le long du chemin, aucun des grands constituants de la tradition musicale méditerranéenne ne fut en reste : chant berbère, tarab maroco-andalous, chant sépharade, chants turco-hongrois et gréco-balkaniques.
Sur le plan intellectuel, on apprend du dépliant du programme que Zoubeida Idrissi, qui n'est pas seulement une cantatrice mais qui a fait de la musicologie et a enseigné la musique, s'est entourée de plusieurs chercheurs dans les domaines de musicologie et d'ethnomusicologie en préparant sa contribution à Mawazine. En plus des de répertoire dont la mélodie est de tradition, la composition des nouvelles mélodies d'adaptation, celles notamment des deux chants berbères, se fait selon les règles de l'art en respectant les modes propres à chaque tradition musicale. Zoubeida Idrissi veille à cela de concert avec le jeune et prometteur arrangeur de talent de son orchestre, Oussama Nouassri.
Une dernière remarque pourtant en ce moment où, avec les transformations rapides des cadres enthnomusicoloques et sociaux, on commence à parler de la "scénologie" (discipline de la mise sur scène): Malgré toute la beauté de l'espace de la Villa des Arts de Rabat, les organisateurs semblent avoir minimisé l'importance d'un détail de mise en scène. Ils ont programmé la prestation de la cantatrice à 19:30 (heure d'été) et dans un espace semi ouvert à la lumière du jour, détail de mise en scène incompatible avec l'esprit du genre musical concerné, à savoir le chant et le lied, musique de nuit par excellence (al. Nachtmusik).
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