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LA LANGUE HEBRAÏQUE A L'UNIVERSITE MAROCAINE

LA LANGUE HEBRAÏQUE A L'UNIVERSITE MAROCAINE

(Eléments de réflexion)  [i]

 

                                                                     Mohamed Elmedlaoui

                                                                     Oujda 25 01 1997 [ii]

 

 

Circonstaciation du texte

            Ce document de réflexion consiste en un ensemble d'idées issues d'une expérience personnelle, et présentées en tant que contribution à l'effort qui s'impose aujourd'hui, de faire le point sur la situation et le statut de la Langue Hébraïque à l'Université Marocaine. Quoique le version première de ce texte remonte maintenant (2007) à dix ans, l’expérience des cursus à l’université marocaine ne rend ce texte que plus actuel

 

 

Cheminement d’une réflexion

            Dans le préambule qui étoffe, depuis 1986, les différentes versions du programme de la matière 'Hébreu' des deux années du 2ème cycle dans les départements de ‘Langue et Littérature Arabes’ et d’Etudes Islamiques’ à la Faculté des Lettres d'Oujda, l'auteur du présent document écrit notamment ce qui est traduit en (1), à partir de l'Arabe:

 

(1)     «Ce programme se fixe comme objectif de doter l'étudiant, au terme de la 2ème année du 2ème cycle (...) d'une base de connaissances relatives à la Langue Hébraïque, de sorte qu'il puisse, par la suite, être en mesure d'exploiter les textes anciens et modernes de cette langue en toute indépendance pédagogique. Une fois cet objectif atteint, de larges horizons sont susceptibles de s'ouvrir devant quiconque désire de se spécialiser en langue et littérature hébraïques et/ou en pensée judaïque.  Tout comme cela est de nature à doter le chercheur de demain d'un nouvel outil de recherche et d'exploration aussi bien dans le domaine des lettres et civilisations que dans celui de la linguistique générale ou chamito-sémitique, ou encore dans celui de l'histoire et de la comparaison des religions. Et puisque le statut actuel de la langue hébraïque dans l'Université Marocaine  repose encore, dans une large mesure, sur un apport considérable des efforts autodidactiques basés essentiellement sur l'approche des textes en se servant des dictionnaires, le programme accorde une importance particulière à la morphologie et à la phonologie (...), disciplines indispensables à la consultation lexicale dans le domaine sémitique surtout».

 

            Deux ans plus tard, en 1988, le même auteur écrivit ce qui est donné en (2) ci-après, traduit également de l'Arabe, et ce dans une introduction à un manuel en Arabe qui traite de phonologie et de morphologie hébraïques et qui, après deux essais de publication, qui ont donné lieu à plusieurs tours de correction d'épreuves auprès de  deux maisons d'édition, Toubqal (Casablanca) et Al-kalam (Rabat), finit par sombrer dans l'oubli pendant plusieurs années pour des raisons 'techniques', avant de se retrouver de nouveau sur le tampon d'attente dans les services de publication de la Faculté des Lettres d'Oujda; il s'agit du passage suivant:

 

(2)     «L'Hébreu est une langue stratégique pour l'Arabe et pour ceux qui en font usage (...). Géopolitiquement, cette langue est indispensable aussi bien pour faire la guerre que pour conclure la paix: Quiconque ignore la langue de l'Autre est dépourvue d'une machine stratégique de combat en temps de guerre, tout comme il se trouve privé d'un instrument essentiel et efficace dans la conclusion et l'établissement de la paix en temps de paix. La connaissance de la langue hébraïque est également indispensable pour une bonne compréhension des structures de l'Arabe, aussi bien historiques que synchroniques. L'Arabe peut autant tirer aujourd'hui profit de l'Hébreu que celui-ci en a tiré à différentes époques. Le fait que les Saintes Ecritures soient indissociables de l'Hébreu pour ce qui est de leurs sources, fait de la connaissance de l'Hébreu un devoir collectif, si important qu'une nation civilisée ne peut acquérir sa part de connaissance sérieuse des différents aspects confessionnels et religieux universels qu'en s'en acquittant. L'établissement, depuis l'antiquité, de nombreuses et importantes communautés juives en Orient et au Nord de l'Afrique où elles ont instauré des centres et des fiefs, et où elles ont contribué à l'économie, à la culture, à la science et au fonctionnement des Etats (...), rend parfois l'Hébreu indispensable pour l'historien également».

 

            A l'automne 1995, une participation au Festschrift du doyen de la philologie des textes maroco-andalous, Professeur Mohamed Bencherifa, fut l'occasion pour l'auteur du présent document pour attirer l'attention des spécialistes présents à la conférence, sur les lacunes qui ébrèchent l'effort collectif déployé dans le domaine de la réhabilitation du patrimoine Maroco-Andalous,[iii] qui risque, faute d’outillage de qualification adéquate des chercheurs, d'être entièrement confisqué par les différentes parties qui s'en réclament à tort ou à raison et qui, par une sorte de loi naturelle, ont toutes les chances de se l'approprier plus ou moins de façon 'légitime' en fonction du volume de "l'effort à la Renaissance" que les générations y déploient à son profit. C'est surtout le volet andalou de ce patrimoine, qui fait l'objet de toute une compétition internationale de 'récupération'. A cet égard, mon collègue, le Professeur Chahlan, précurseur des études hébraïques au Maroc, a bien précisé avec raison, dans une communication donnée, il y a une dizaine d'années, ai-je ajouté, que c'est au Maroc, plus qu'à toute autre partie, que revient le droit de rédemption sur ce patrimoine. C'est là le sens même de l'action historique concrète ancestrale du Maroc dans cet espace, le sens de son investissement politique séculaire dans la région, le sens de sa contribution en capital humain en Andalousie, le sens de sa situation géographique en tant qu'ancien arrière pays pour cet espace de civilisation du temps de sa floraison et en sa qualité de principale terre d'asile pour cette civilisation par la suite. Reste à savoir si les moyens concrètement déployés sont à la hauteur des droits. En réponse à cette question j’ai conclu par lancer l’avertissement qu'à moins de se résoudre à faire ce qui s'impose dans le domaine, et ce par la mise au point notamment d'un long programme lucide de formation dans toutes les langues qui véhiculent le patrimoine en question, dont l'Hébreu en particulier, pour ce qui fait l’objet de notre propos, le Maroc risque de se trouver un jours hors de la compétition. La réceptivité de l'auditoire au plaidoyer fut surprenante: sans que l'intervenant n'en formule lui‑même la proposition, les participants au Festschrift eurent, comme réaction, l'heureuse initiative de faire une recommandation sur la nécessité de prêter toute l'attention qui s'impose à la question de la sauvegarde de tout ce pan du patrimoine maroco-andalous où la l’Hébreu est impliqué d'une manière ou d'une autre. Cette recommandation paraîtra parmi les actes du Festschrift, dont les épreuves sont actuellement en cours de correction.[iv]

 

            C'est dans le cadre de cet effort de réhabilitation du patrimoine scientifique maroco-andalous que s'inscrit précisément une grande initiative, celle d'organiser le Premier Congrès Chamito‑ Sémitique de Fez (Fez 12-13 mars 1997). Après avoir bercé l'idée d'organiser ce congrès pendant une dizaine d'années, c'est sur Fès que le choix de l'auteur du présent document, initiateur du congrès, a porté pour en abriter les travaux; et cela pour des considérations purement symboliques, et malgré les difficultés énormes que présente l'organisation d'un congrès international à la Faculté des Lettres de Fès-Saïs quand on est vice-doyen à la Faculté des Lettres d'Oujda. Voici, à titre d'exemple, ce qu'on peut lire dans l’argumentaire de l'annonce du congrès, document rédigé et adressé aux spécialistes par l'auteur du présent document:

 

(3)     «Pourquoi Fès?

Si le comparatisme chamito‑sémitique est né dans le creuset du comparatisme sémitique, celui‑ci ne peut être considéré comme sous‑produit du comparatisme de l'Après‑Renaissance, et encore moins comme une trouvaille du comparatisme neo‑grammairien allemand du 19e siècle, que pour ce qui est de ses aspects modernes. En effet, loin des idées reçues en histoire de linguistique, c'est au 10e siècle, et sous forme d'un échange épistolaire savant, entre Tahert et Fez, que le comparatisme (sémitique) systématique et conscient vit le jour pour la première fois: il s'agit de la fameuse épître (risâlat ou iggereth) que Ben Quraysh Almaghribiy adressa à la communauté juive de Fès, et qui dresse le plus ancien tableau systématique connu, des correspondances phonétiques entre l'Arabe, l'Hébreu et l'Araméen. Ce qui montre, d'autre part, que le contenu de cette épître appartenait au tronc commun des connaissance partagées à cette époque en Occident Musulman, est qu'on en retrouve l'écho, explicitement rendu, chez l'un des encyclopédistes musulmans de l'époque, Ibn Hazm de Cordoue. En prenant donc l'initiative d'organiser ce colloque international à Fez, la Faculté des Lettres- Fès-Saïs cherche à renouer avec ce passé glorieux qui montre que l'échange inter‑culturel ouvre toujours des horizons heureux pour la science».[v]

 

            La morale et l'esprit de tout ce qui précède est que l’œuvre pour un accès direct du chercheur marocain aux documents sources de la composante juive et hébraïque de l'histoire du Maroc et pour le transvasement par la suite des connaissances ainsi acquises dans la langue nationale accessible à la majorité des citoyens, est une  entreprise qui doit être inscrite aux plus hauts niveaux des stratégies culturelles de la nation marocaine.

 

            Si tout le monde se rend compte aujourd'hui de la pluralité et de la multiformité des composantes de la culture du Maroc et de son histoire, comme c'est le cas pour toutes les grandes nations, l'accès direct à l'outillage d'exploration et d'exploitation de ces différentes composantes n'est pourtant pas condamné à se faire, en ce qui concerne la composante qui nous intéressent ici, sur des bases confessionnelles, comme le pensaient encore il y a seulement quelques années beaucoup d'esprits aussi brillants et ouverts que le regretté Germain Ayyach, dont l'oeuvre concrète donne pourtant bien heureusement la preuve de la fausseté de ce genre d'idées reçues. A la suite d'une lecture qu'il a bien voulu faire d'un article intitulé "Image du Maroc dans certains écrits hébraïques", écrit en arabe en 1994 par l'auteur de la présente note,[vi] Professeur Zafrani, mémoire vive et vivante de la composante juive de l'histoire en Terre d'Islam et membre de l'Académie du Royaume du Maroc, exprime, dans une lettre adressée à l'auteur de l’article, son accord total sur la nécessité d'abolir ces frontières confessionnelles en matière de recherche. Voici ce qu'il dit dans sa lettre:

 

(4)        "Le sujet traité méritait en effet d'être étudié et principalement par le partenaire‑frère musulman dans cette mémoire et cette histoire commune et chère à nous tous".

 

Situation actuelle et perspectives

On peut donc dire qu'aujourd'hui, la distribution appauvrissante du travail de recherche sur des bases confessionnelles n'est plus de mise au Maroc, grâce aux fruits de plus d'un quart de siècle de présence 'déconfessionnalisée' de la Langue Hébraïque à l'Université Marocaine, même si cette présence demeure encore sans mécanismes internes d'évolution propre et autonome qui soit de nature à  assurer  une pérennité. En fait, malgré un certain changement de situation, qui semble se profiler dernièrement, l'observateur constate avec inquiétude que, de l'autre rive du creux des générations, de très brillants étudiants et étudiantes se distinguent chaque année dans nos facultés de lettres en matière d'Hébreu sans qu’ils/elles puissent aller plus loin. Il arrive à beaucoup d'entre eux et d'entre elles de nourrir, pendant un certain temps, le rêve de pouvoir y 'aller plus loin' et 'en savoir plus', mais ils/elles finissent tous et toutes par découvrir aussitôt et pas plus loin qu'à la fin des études de 2e cycle, que la situation est bloquée et sans lendemain. Cette situation s'est aggravée ces dernières années, depuis que les possibilités d'étude en France, pays principal où se faisait la formation auparavant, ont commencée à frôler les limites de l'impossible, à cause des problèmes de visa.

 

            Jusqu'à maintenant donc, la 'formation des cadres' dans cette langue en particulier, et dans les langues orientales et sémitiques en général, est livrée aux fantaisies autodidactiques de certains choix personnels faits au gré d'initiatives individuelles; et rien n'assure que même le renouvellement de cet embryon existant de corps enseignants puisse être assuré à l'avenir. Tout ceci malgré l'existence, effective mais latente et inhibée, d'une demande de cette langue dans d'autres domaines que l’enseignement et la recherche. En fait, il n'y a pas que l'enseignement supérieur comme client potentiel en ce qui concerne la formation dans les langues orientales et sémitiques dont l'Hébreu en particulier. Des demandes potentielles sont à l'état latent, dans plusieurs secteurs (Ministère de la Culture, histoire ancienne, archéologie, journalisme, diplomatie, histoire de la presse et de l'imprimerie, recherche fondamentale dans les domaines de la linguistique, de la littérature, des religions, de la mystique, de la philosophie, etc.). Cette demande inhibée n'aurait besoin que d'un minimum d'initiation des décideurs pour se manifester et s'exprimer.

 

            Prenons les deux exemples de l'histoire ancienne et de l'histoire de la presse en Afrique du Nord. La carence de la formation en langues pertinentes dans ces deux domaines est fâcheusement appauvrissante, et l'image qu'on brosse du patrimoine de la nation marocaine à ce niveau sur le fond de cette carence, est une image qui, le plus souvent et le moins que l'on puisse dire, n'est pas digne de la grandeur de ce patrimoine. C'est une évidence que la recherche fondamentale en histoire antique du Maroc ne peut nullement se faire en l'absence de cet outillage indispensables que constituent le Punique, le Libyque, et même l'Hébreu Biblique et l'araméen, à moins qu'on ne se contente de faire de la recherche de seconde main, en passant par les filières traditionnelles des langues romanes d'aujourd'hui. Les langues‑outils en question ont toujours été des instruments de travail pour tout historien d'envergure, tel un Léon l'Africain qui, on doit le savoir, a même rédigé un dictionnaire Hébreu-Arabe en marge de ses autres préoccupations.

 

            Quant à la presse et à son histoire au Maroc et en Afrique du Nord en général, tout le monde est aujourd'hui d'accord sur le fait qu'elle constitue la source la plus féconde de documentation pour l'écriture de l'histoire du Maroc du 19e et du 20e siècle. Or, à moins d'être à la fois arabisant et hébraïsant, personne n'est aujourd'hui en mesure d'exploiter les richesses de ce qui reste de toute cette presse pionnière de l'Afrique du Nord, écrite dans un judéo-arabe particulier: un mélange d'arabe classique et de judéo‑arabe, transcrit, de surcroît, en caractères hébraïques; en somme, une sorte d'équivalent du point de vue fonctionnel de la presse yiddish dans les communautés ashkénazes d'Europe, qui, elle, continue toujours à se débattre contre la mort.

 

            Voilà ce qui fait de la réflexion sur une certaine structure académique propre à assurer la pérennité aux études hébraïques et sémitique à l'université marocaine, un point à l'ordre du jour. A l'état actuel des besoins potentiels, des possibilités d'encadrement et des capacités d'absorption, un seul Département des Langues Sémitiques suffirait à l'échelle du Royaume. Les membres de l'Association Marocaine des Etudes Orientales ont à maintes fois formulé des voeux dans cette direction, et notamment à l'issue de la première rencontre "Etudes orientales au Maroc: bilan et perspectives", que l'Association a tenue en 1994 à Rabat en collaboration avec la Faculté des Lettres de Rabat et l'Ecole du Roi Fahd pour la Traduction. Tout récemment, les participants à la rencontre informelle d'exploration et d'échange d'idées, tenue à Rabat le 04 01 1997, au siège du Centre de Recherche sur les Juifs du Maroc, à l'initiative de Mr. Robert Assaraf, Président‑Fondateur du Centre et en présence du Pr. Albert Sasson, ont fait part des mêmes préoccupations et exprimé les mêmes attentes.

 

            En attendant que les conditions soient réunies, qui permettent de concrétiser ces aspirations sous une forme ou une autre, certaines formules provisoires d'encadrement s'imposent, qui soient de nature à permettre à certains étudiants et étudiantes qui se distinguent au terme de la fin d'étude de 2ème cycle en Hébreu, de pouvoir continuer leurs études supérieurs.

 



[i] Cf. mon article en arabe " اللغة العبرانية في عشرية تدبير اللغات الأجنبية بالمغرب"  sur le site : http://www.ahewar.org/m.asp?ac=&st=&r=20&i=1854&fAdd=

.

[ii]  Ce document,  rédigé à la date mentionnée, a circulé auprès de certains collègues et de certaines institutions dont le CRJM (Rabat). Les notes n'y  ont été rajoutées qu'au 01 06 2000.

[iii]   المدلاوي، محمد (1997) "عن التراث المتداخل اللغات في الغرب الإسلامي: نماذج للتداخل بين العربية ةالعبرانية والأمازيغية".  تحقيق التراث المغربي الأندلسي؛ حصيلة وآفاق؛ تكريما للأستاذ محمد ابن شريقة. منشورات كلية الآداب والعلوم الانسانية – وجدة. 1997؛ ص: 313-328 .

    [iv]  تحقيق التراث المغربي الأندلسي؛ حصيلة وآفاق؛ تكريما للأستاذ محمد ابن شريقة. منشورات كلية الآداب والعلوم الانسانية – وجدة. 1997

[v] Elmedlaoui, Mohamed (1998) "Préambule". Pp 9-10 in Elmedlaoui, Gafaiti et Saa : Actes du 1er Congres Chamito-Sémitique de Fès. Publications de la Faculté des Lettres et des Sciences Humaines Saïs-Fes 1998.

    [vi]  المدلاوي، محمد (1994) "صورة المغرب في بعض المكتوبات العبرانية واليهودية". محاضرة ألقيت في ندوة الدراسات الشرقية : واقع وآفاق الرباط : 18-19 أبريل 1994؛ من تنظيم "الجمعية المغربية للدراسات الشرقية" بتعاون مع "كلية الآداب والعلوم لإنسانية بالرباط" و"مدرسة الملك فهد العليا للترجمة"؛ ونشرت في مجلة مواســــم (طنجة - المغرب)؛ ع 4 ؛ 23-34 . أعيد نشرها في العدد 15 (1997؛ ص17-28) من شؤون مغربـــية بطلب من مديرها محمد العربي المساري. ثم في المدلاوي 1999 (عن الذاكرة والهوية؛ سلسلة 'شراع'، عدد 64)، ثم في كتاب: الدراسات الشرقية؛ واقع وآفاق؛  منشورات كلية الآداب والعلوم الانسانية بالرباط 2004، سلسلة : ندوات ومناظرات رقم 111.

 

 



21/12/2007
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